Dimanche 1er décembre. 15h05. Nous sommes en retard. Les autres voitures sont déjà garées dans le jardin. Vite. Oma avait dit 15h00. Chacun des enfants tient une quiche lorraine préparée le matin même. Mon cher et tendre sort du coffre un panier dégustation pour Oma. Avec l’amoureuse de mon grand, nous portons les sacs de jute avec les cadeaux et allons les déposer dans la brouette dans l’étable.
Nous entrons dans la cuisine. C’est l’embouteillage. Toute la famille arrive en même temps. On s’embrasse. Opa s’est levé de son fauteuil pour accueillir les trois générations. Son arrière-petite-fille, deux ans, se cache dans le cou de son papa. Le bébé d’un mois, dans sa combinaison pilote nounours, dort. Nous suivons les pas lents d’Opa vers le salon. Les canapés et fauteuils ont été déplacés. Des chaises de jardin viennent compléter le cercle. Oma a déposé du pain d’épices, des pepernoten et des biscuits de speculoos sur la table basse. Lorsque tout le monde a une tasse ou un verre dans les mains, le téléphone sonne. Oma répond : « Bonjour Saint-Nicolas… Oui, nous sommes tous là… Les enfants aussi… Parfait. Nous y allons. Merci Saint-Nicolas ». Oma raccroche. La petite deux-ans a tourné la tête vers son arrière-grand-mère : « Saint-Nicolas est passé et a laissé des cadeaux dans l’étable ». La petite enfile de force un manteau, puis court vers l’étable. Elle attrape un paquet dont elle voudrait déchirer le papier. Il faut attendre. Il y a des noms dessus. Mon beau-frère empoigne la brouette et la fait rouler jusqu’à l’entrée. Nous portons les cadeaux dans le salon en nous écriant : « Saint-Nicolas a apporté plein de paquets ».
Dès fin octobre, nous avons décidé dans le groupe what’s app familial d’une date, d’un lieu et d’un montant pour les cadeaux. Ma belle-sœur a organisé le tirage au sort. Chacun a pioché le nom d’un autre membre de la famille et une liste de cadeaux désirés. Chacun avait pour mission d’écrire un poème et d’acheter des présents pour 20€ maximum, et ce, pour une seule personne.
Nous sommes assis en cercle. La deux-ans tape sur les lames arc-en-ciel de son nouveau xylophone et notre dix-huit ans lit son poème. Il est question de retard de livraison. Pour l’aider à attendre ses livres, son Saint-Nicolas lui offre un calendrier de l’avent rempli de chocolats. Bien qu’adulte, ce Saint-Nicolas se fait réprimander par sa mère, ma belle-sœur. « La commande a dû être passée trop tard. » Dans le poème de mon beau-frère, il est question de bricolage et l’un de ses cadeaux est un lot de couvercles en PVC 75 mm. Il a l’air content. Le neveu de 28 ans, beau gosse, mais toujours célibataire, voulait un parfum. Dans ses rimes, son Saint-Nicolas espère que ça va l’aider à trouver une copine. Ou un copain, c’est OK aussi. Opa a demandé en douce des mouchoirs en coton, au grand dam d’Oma qui refuse de faire tremper les tissus souillés. Il semble heureux de ses dix mouchoirs. Le poème fait référence à sa gymnastique gériatrique. Il en profite pour nous montrer avec fierté qu’il arrive à faire la cigogne, c’est-à-dire à rester en équilibre sur un pied. « Non, Opa, ne lâche pas le dossier ». Trois secondes plus tard, il a les deux pieds au sol à nouveau. Sifflements et applaudissement général.
Les sacs de jute sont vides. Oma fait chauffer la soupe de petit-pois. Je coupe les quiches. On essaye de deviner qui avait qui. Il fait nuit déjà. Les jeunes parents s’en vont. Ils doivent aller coucher les petits. Nous restons boire un café, aidons à débarrasser. « Laissez, j’ai la semaine pour ranger ». J’ai rassemblé nos cadeaux, nos poèmes. Nous nous embrassons et nous donnons rendez-vous à Noël.
Opa et Oma nous regardent partir derrière leur fenêtre. Ils nous font un signe de la main. Je repense à ma grand-mère qui disait : « les moments heureux sont trop courts ». Ça fait déjà vingt ans qu’elle n’est plus là pour nous regarder partir derrière sa fenêtre. Vivement le 25 décembre.
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