Dans mon quotidien aux Pays-Bas, il me reste une frustration.
Comprenez-moi bien, ce petit pays, aux fils des ans, a eu raison de mon chauvinisme. Bon, les premiers temps, j’ai bien râlé un peu contre la météo, la gastronomie et la dictature de l’agenda. J’aurai l’occasion de vous en parler dans une prochaine chronique. Mais, en adoptant les us et coutumes, je suis finalement heureuse et fière de vivre aux Pays-Bas.
Cependant, malgré ma pratique intensive de la technique du caméléon, il me reste une frustration : je paye mes impôts aux Pays-Bas, mais je n’ai pas le droit de vote. Enfin, j’exagère un petit peu. Je vote pour les élections locales et les élections européennes, mais je n’ai pas le droit de voter pour les élections nationales.
Pourquoi ? Parce que je n’ai pas la nationalité néerlandaise.
Donc élection après élection, référendum après référendum, l’insatisfaction grandit. Et malgré cela, jusqu’à peu, je n’avais pas encore franchi le pas de me renseigner sur la possibilité de demander la double nationalité, me convaincant que ces histoires n’était qu’un problème de luxe : je suis européenne, citoyenne du monde, des gens se noient tous les jours en Méditerranée pour avoir un passeport rouge comme le mien. De quoi je me plains ?
Avec une amie danoise, le sujet revient toujours sur la table. Ne pas avoir le droit de vote au niveau national nous chagrine. Puis, avant l’été, mon amie, rayonnante, m’annonce la nouvelle : elle est Néerlandaise, elle a voté au dernier référendum. Pendant que je découvrais les résultats au journal du matin, avalant une nouvelle gorgée de café pour faire passer mon sentiment de dégoût et d’impuissance, elle avait voté, elle.
Il était temps d’entreprendre de l’action. J’allais demander la nationalité néerlandaise. J’appelais donc le Service de l’Immigration.
Une voix masculine m’a confirmé que je répondais aux critères pour être naturalisée néerlandaise tout en gardant la nationalité française. La voix m’a ensuite posé LA question: « Pourquoi voulez-vous devenir néerlandaise ? ». Je lui ai parlé d’impôts, d’injustice, de frustration, de « no taxation without representation », de révolution américaine, bref de droit de vote. La voix est restée silencieuse. Puis la voix a soufflé un sourire et m’a répondu que cet argument ne lui avait jamais été donné, mais qu’il valait mieux rester Française car «la politique aux Pays-Bas n’est pas intéressante. Nous sommes toujours tellement corrects. Au moins en France, il y a des scandales, du suspens, des enjeux ». Pour la voix, suivre la politique française était tout aussi captivant qu’une série de Netflix. Et là, c’est moi qui suis restée silencieuse. Puis c’est moi qui ai souri.
En me renseignant sur les démarches à effectuer, j’ai alors découvert que je ne peux pas bénéficier de la même procédure que mon amie. Il me faut entre autres payer un montant équivalent à 80% du SMIC mensuel pour pouvoir voter ou attendre encore 6 ans, soit en principe deux élections.
J’ai réfléchi tout l’été en scénario catastrophe. Quelles sont les conséquences, si le candidat le moins démocrate gagne les élections néerlandaises?
Les Pays-Bas n’ont pas de président. Leurs élections nationales sont les élections parlementaires à scrutin proportionnel. Le gouvernement est issu d’une coalition composée de différents partis qui ensemble ont la majorité à la deuxième chambre (équivalent de l’assemblée nationale française). Bref, différents partis du spectre politique sont représentés au gouvernement et les dégâts sont limités.
J’ai alors décidé de ne pas me faire racketter. Je vais rester française, seulement française, et voter en France, seulement en France encore quelques années.
Au printemps 2017, nos deux pays se rendront aux urnes, les Néerlandais en mars et les Français un mois plus tard. Je me console en me disant que je ne sais pas pour qui je vais voter, mais que je sais contre qui je vais voter. Je sais à qui je ne veux pas donner les pleins pouvoirs de monarque présidentiel, l’arme d’un 49.3, un siège au Conseil de Sécurité et les codes de la bombe. J’espère que ma frustration sera compensée par le sentiment d’accomplir un acte responsable de citoyenne du monde.
La digue en été
J’ai exactement la meme frustation que vous. Je vis, je travaille (enfin mon mari et moi je fais du benevolat), nous payons des impots, nos enfants sont scolarises a l’eole neerlandaise et nous sommes totalement integres. Mais nous n’avons rien a dire sur la marche du pays et sur les decisions qui sont prises concernant notre sante, notre retraite, l’eduction des enfants. De plus, si je veux prendre la nationalite neerlandaise, je dois abandonner
ma nationalite francaise car je suis mariee a un francais…. alors non…
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