Notre onze ans doit actuellement choisir l’établissement secondaire dans lequel il va poursuivre sa scolarité jusqu’à l’équivalent du baccalauréat. Si nous étions en France, la question du choix ne se poserait pas. Nous serions soumis comme tout le monde à la sectorisation. En fonction de notre adresse, notre fils serait envoyé vers tel ou tel collège. Pour pouvoir aller dans un établissement mieux côté, nous devrions peut-être déménager ou louer un garage en centre-ville pour avoir une boîte aux lettres dans un « bon » quartier. Notre marge de manœuvre s’arrêterait là.
La mixité sociale n’existe pas. Bon courage les gars des banlieues pour vous en sortir ! Et vive l’égalité !
Aux Pays-Bas, le système est complètement différent.
Les enfants ont dès le CP des contrôles continus identiques dans tout le pays. En fonction de l’évolution des résultats de l’enfant, de l’attitude et de la motivation, l’équipe pédagogique donne un conseil d’orientation à la fin du cycle primaire. Ce conseil concerne le niveau de l’élève et le type d’établissements du second degré adaptés à l’enfant.
Il n’est pas nécessaire d’attendre la fin de la troisième pour être orienté vers une voie professionnelle, technologique ou générale. Ainsi, chaque enfant a un enseignement à son niveau et a moins de risque d’être en échec scolaire au collège, avec les cicatrices qui en découlent.
A partir du conseil donné par l’école primaire, l’enfant va devoir choisir trois établissements. Pour faire son choix, il va consulter sur Internet les résultats des différentes écoles, se renseigner sur le temps de trajet à vélo, étudier les brochures et se rendre aux journées portes ouvertes durant lesquelles il lui est possible de suivre des leçons, de visiter les locaux, de rencontrer les élèves et les professeurs. Chaque établissement doit se vendre. On peut parler de concurrence oui, mais c’est dans l’intérêt de la qualité de l’enseignement et de la diversité de l’offre, car finalement en fin de scolarité secondaire le « bac » est le même partout.
Dans l’école qui est le premier choix de notre fils, l’enfant suit un enseignement général avec, s’il le souhaite, du latin dès la deuxième année. Comme notre fils aura peut-être des facilités en français, il peut éventuellement passer le bac de français une année plus tôt. Ce qui l’attire aussi, c’est la possibilité de ne pas assister à certains cours dans les matières pour lesquelles il aurait au moins 14 de moyenne et d’utiliser ces heures libérées pour développer un autre talent. L’élève s’engage néanmoins à garder sa moyenne d’au moins 14 dans la matière aux horaires allégés. Et vous savez quoi ? Dans la pratique, les enfants réussissent car ils sont motivés et donc prêts à fournir plus de travail personnel. Notre onze ans aimerait devenir Designer automobile. Il se voit bien utiliser cette option pour prendre des cours de graphisme et de dessin dans le cadre scolaire.
Dans une autre école, il est possible de suivre l’enseignement en anglais ou dans une autre encore de faire un Technasium, c’est-à-dire qu’en plus des matières générales, les enfants ont « recherche et développement » et travaillent sur des concepts techniques comme par exemple la construction d’une ville 100% écologique ou un système d’assainissement de l’eau au Kenya. Idéal pour les futurs ingénieurs.
Si notre onze ans n’est pas tiré au sort dans l’école qui a sa préférence, ses deux autres choix se portent sur des Gymnasium, filière généraliste avec en bonus du grec et du latin. Pour avoir assisté lors d’une journée portes ouvertes à une leçon, j’avoue que je comprends son engouement pour ces deux langues dites mortes : elles sont les racines de notre culture, de la démocratie, de notre droit. Et quel plaisir de maitriser l’épistémologie. Saviez-vous par exemple que sur le fronton de la bibliothèque d’Alexandrie se trouvait l’inscription « Psychies iatreion », c’est-à-dire « hôpital de l’âme » ?
Mais je m’égare.
Je trouve formidable que les enfants aient l’opportunité si jeunes de réfléchir à leur avenir et de choisir leur école car au-delà des résultats de l’établissement et des programmes à la carte, tout le monde est unanime (les instituteurs, les professeurs, les parents), l’enfant doit écouter son intuition et aller là où il se sent à sa place.
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